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Marché complémentaire : définition et fonctionnement

7 % des marchés publics font l’objet d’un contrat complémentaire chaque année en France. Un chiffre discret, mais révélateur : derrière chaque procédure, la réalité des besoins évolue, bouscule les cadres et met à l’épreuve la rigueur réglementaire. Les ajustements ne tiennent ni du hasard, ni d’un caprice administratif. Ils sont la soupape encadrée d’un système qui doit rester à la fois réactif et irréprochable.

Au fil de l’exécution d’un marché public, des prestations inattendues ou des variantes s’imposent parfois, sans remettre en cause la logique budgétaire du contrat. Selon la nature, l’urgence ou la valeur des besoins, les règles qui s’appliquent varient. Chaque modification doit se plier à un cadre bien précis et justifié.

Marché complémentaire dans les marchés publics : de quoi parle-t-on exactement ?

Dans l’arsenal des marchés publics, le marché complémentaire occupe une place à part. Il donne à l’acheteur public la latitude nécessaire pour répondre à des besoins apparus après la signature du marché initial. Ce contrat, distinct du marché principal et de l’avenant, existe dans un cadre strictement défini par le code de la commande publique. Sa spécificité : être à la fois autonome sur le plan juridique, mais étroitement lié au marché initial d’un point de vue opérationnel.

En pratique, cette possibilité s’ouvre pendant l’exécution du marché initial, voire une fois celui-ci achevé si l’enjeu touche la continuité du service. Contrairement à l’avenant, qui modifie le contrat en cours, le marché complémentaire crée un nouveau lien contractuel, mais avec le même titulaire.

Son usage se justifie uniquement pour des prestations imprévues ou des besoins proches, non identifiés lors de la procédure principale. Pas question d’en faire un prétexte pour éviter les règles de publicité ou de concurrence : la législation ne laisse aucune place à l’improvisation. Un marché complémentaire ne s’envisage qu’en cas de réelle nécessité technique ou économique, avec formalisation écrite à partir de 15 000 euros HT. Des plafonds financiers encadrent strictement ce recours : pas plus de 50 % du montant initial pour les travaux ou services, critères précis pour les fournitures.

Derrière ce cadre se dessine l’enjeu central : permettre à l’action publique de tenir ses promesses avec souplesse, sans jamais tourner le dos à la transparence, à la rigueur des procédures et à l’égalité de traitement. Utiliser le marché complémentaire, c’est refuser le bricolage pour mieux servir l’intérêt général.

Comprendre le fonctionnement et les conditions d’utilisation d’un marché complémentaire

L’organisation d’un marché complémentaire répond à une chaîne décisionnelle rigoureuse. L’autorité administrative compétente agit pour l’État ; l’organe délibérant prend la main pour une collectivité ou un établissement public ; la commission d’appel d’offres (CAO) entre en jeu si le montant atteint les seuils communautaires. Dans chaque cas, c’est le pouvoir adjudicateur qui contracte avec le titulaire initial.

Ce recours n’est envisageable que si le besoin est strictement nécessaire pour terminer ou réaliser l’opération prévue dans le marché principal. Aucun empressement à corriger une prévision défaillante, aucune anticipation d’évolution évidente ; seules les véritables surprises ou prestations similaires non prévues en justifient l’utilisation.

Pour saisir ce qui fonde la légalité de la démarche, voici les exigences majeures à respecter :

  • Formalisme écrit requis dès 15 000 euros HT.
  • Plafond fixé à 50 % du montant du marché initial pour travaux ou services complémentaires.
  • Pour les fournitures, seuils particuliers : 134 000 euros HT pour l’État, 207 000 euros HT pour les collectivités.
  • Publication obligatoire lorsque le seuil communautaire est dépassé.
  • Transmission au préfet à partir de 207 000 euros HT.

Le Code de la commande publique exige, de surcroît, une motivation technique ou économique précise, la traçabilité de chaque arbitrage, la conservation attentive des preuves et un examen de légalité par les instances compétentes. Un niveau d’exigence élevé, sous la surveillance constante de la Direction des affaires juridiques (DAJ), garante de la conformité de chaque étape.

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PSE et variantes : quels enjeux pour les acheteurs et les entreprises ?

Le recours à des prestations supplémentaires (PSE) ou à des variantes ajoute de la complexité à la procédure du marché complémentaire. Les PSE permettent à l’acheteur d’étendre le cahier des charges, en intégrant des services ou fournitures non envisagés au départ. Les variantes ouvrent quant à elles la porte à des solutions techniques alternatives, souvent plus inventives, apportées par les entreprises qui répondent.

Trois piliers restent non négociables : transparence, égalité de traitement et proportionnalité. Toute PSE doit être justifiée, documentée, explicable à tout moment. Sauf dérogation explicitement prévue, la mise en concurrence reste incontournable. La grille d’analyse des offres s’applique à tous, sans exception, car la moindre faille donne prise à la contestation.

Voici les points à surveiller pour chacun des acteurs impliqués, sous peine de transformer une opportunité en source de litiges :

  • L’acheteur public doit exprimer le besoin réel sans fermer la porte à l’innovation, tout en respectant les exigences de publicité et d’analyse rigoureuse.
  • L’entreprise peut miser sur les variantes pour se démarquer, mais doit sans cesse veiller à rester fidèle au cadre initial et aux règles du jeu.

Plus le dossier de consultation est précis, moins il laisse de place au malentendu : cette exigence limite les litiges, fluidifie la procédure et renforce la concurrence de façon tangible. Un contrôle affiné des PSE et variantes permet d’atteindre un achat public réellement performant, et ouvre la voie à plus d’agilité collective, sans jamais sacrifier la ligne de conduite réglementaire.